Vendredi 31 Août
Habitués à nous lever après 10h depuis notre arrivée sur l’île, le réveil est assez dur. Nous chargeons les sacs dans le petit camion de Sergey et montons à l’avant, direction Irkoutsk.
Je le vois faire le signe de croix en prenant le volant, et lui demande s’il y a une raison particulière. « C'est pour demander protection à Dieu ». « Ah ». Une fois l’engin lancé sur les pistes de terre trempées par la pluie, je ne tarde pas à comprendre : une certaine vitesse est nécessaire pour franchir les côtes et sur ce terrain glissant, le moindre nid de poule (on ne les compte plus ici) fait faire des embardées assez impressionnantes au véhicule. La route est une immense flaque de boue, sur laquelle nous n'avons aucune adhérence. Sergey est très habile au volant et semble expérimenté, je n’en suis pas moins très raide sur mon siège, agrippant la cuisse de Maxime qui lui a plutôt l’air calme.
Une heure à voir nos vies défiler devant nos yeux sur cette piste, et après quelques dérapages (à peine) contrôlés, nous arrivons au ferry avec lequel nous quittons l’île pour retrouver les routes goudronnées du continent, fréquemment traversées par des vaches.
Nous retrouvons les paysages vastes, les chevaux et les aigles de l’aller et marquons une pause dans une église orthodoxe où Sergey veut s’entretenir avec un prêtre. L’intérieur est superbement décoré de fresques et d’icônes aux couleurs vives, nous sommes impressionnés d’apprendre que tout ceci est le fruit du travail du seul prêtre.
Sergey nous dépose au centre d’Irkoutsk où il faut trouver l’agence de voyage qui doit nous remettre les billets de train pour Oulan-Bator avant de pouvoir rejoindre une autre petite ville au bord du lac pour les deux jours restants en Russie. Nous les récupérons sans problème, volons au passage du papier dans les toilettes du bâtiment (c'est une denrée rare en ce pays) et prenons le déjeuner dans un self végétarien d’inspiration indienne : Govinda.
A la gare routière, nous tombons directement sur un minibus dont le chauffeur nous interpelle : « Listvianka ? », « Ok ». Deux personnes sont déjà installées à l’intérieur, nous attendrons près de 30mn qu’il soit plein pour démarrer. Nous sommes les seuls à parler, un peu trop fort selon Maxime. Deux filles en face nous observent, amusées, pendant tout le trajet, c’est dur de s’y habituer.
Le minibus nous dépose au centre de Listvianka, petite ville étirée sur 4 ou 5km le long du lac. Une courte recherche nous mène à notre point de chute pour les deux prochaines nuits : le Baikaler Eco Hostel, la première auberge de jeunesse écologique de Russie (ampoules à économie d’énergie, isolation en mousse de basalte, panneaux solaires-tout un concept) En fait d’ecologie, nous sommes surtout contents d’avoir une belle chambre double en bois clair avec télé, douche chaude et toilettes à l’occidentale au lieu de trous creusés dans le sol, deux jours de vrai confort sur tout le voyage !
Il est près de 16h, nous faisons une petite balade au hasard dans un quartier de vieilles maisons en bois aux volets colorés pour tomber sur une petite exposition en plein air de sculptures métalliques assemblées à partir de pièces automobiles.
La faim nous fait prendre la direction du marché où déjà, la plupart des commerçants ont remballé leurs étals. Il en restait assez pour nous sentir oppressés, seuls touristes face à toutes les interpellations. Deux barquettes d’omoul cru aux oignons plus tard, nous voilà sur la plage de galets, face au soleil couchant. Nous décidons de goûter aux pignons de pin de Sibérie que nous avons déjà vus sur les quais dans le train, et qui ne ressemblent pas du tout à ceux que l’on trouve dans le commerce. Il nous faut en croquer une poignée, faire la grimace et recracher pour finalement rire devant notre naïveté : « Aah bon il faut les décortiquer avant ! ». Les jours suivants nous nous consacrerons maîtres dans l’art du décorticage de pignons de pin.